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Piloter la Transition Energétique

Quelle est la réalité de la transition vers les carburants alternatifs dans les transports ?

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Ce mois-ci, nous examinons la transition énergétique dans le secteur des transports, en particulier les technologies mises en avant et les pays précurseurs. Ce document a été rédigé par le directeur scientifique et cofondateur d’Enerdata Bruno Lapillonne.

L’un des enjeux de la transition énergétique1 dans les transports est de remplacer l’utilisation des produits pétroliers (principalement l’essence et le diesel) par des carburants de substitution.

Ces carburants alternatifs peuvent être des sources d'énergie décarbonées (telles que les biocarburants) ou des énergies moins riches en carbone (telles que l'électricité2 et, dans une certaine mesure, le gaz naturel), qui réduisent également de manière significative les émissions de polluants3 locaux.

Dans certains pays, la transition est déjà visible

Parmi les pays du G20, le Brésil et l'Argentine sont de loin les plus avancés avec plus de 20% de l'énergie utilisée provenant de carburants de substitution dans le secteur des transports4.

Ils sont suivis par la Chine, la France et le Royaume-Uni, avec une part d’environ 10%, comme le montre la figure 1. Certains pays hors G20 ont bien progressé, notamment la Suède (au premier rang) et, dans une moindre mesure, la Thaïlande, l'Iran, le Pérou, Singapour et la Norvège. Ces pays enregistrent aussi généralement la plus forte progression en matière de carburants de substitution (+20 points de pourcentage pour la Suède de 2000 à 2017, +16 points pour la Thaïlande et l’Iran).

Au Brésil, en Argentine, en France, au Royaume-Uni et en Chine, la transition a été plus lente (+10 points depuis 2000 pour la plupart d'entre eux).

Au niveau mondial, la progression est lente et les carburants alternatifs ne représentent que 6% de la consommation du transport (+4 points depuis 2000).

Figure 1: Plusieurs pays montrent des progrès majeurs de la part des carburants de substitution dans les transports

Progrès majeurs part des carburants de substitution dans les transports

Source : Enerdata, Global Energy & CO2 Data

La part de marché du gaz naturel est élevée en Iran (16%), en Argentine (13%) et en Thaïlande (10%). Son objectif principal est de diversifier l'offre et de réduire la dépendance au pétrole. Ce n'est probablement pas la meilleure stratégie pour une transition vers des carburants à faible émission de carbone, à moins qu'une part croissante de ce gaz soit renouvelable, comme cela est prévu dans certains pays.

La Suède et le Brésil mènent la décarbonation des transports

Si l'on exclut le gaz naturel, les pays en tête sont la Suède et le Brésil, avec une part des biocarburants légèrement supérieure à 20%, suivis par la Norvège, avec environ 10%. En outre, la Suède et la Norvège ont un mix électrique pratiquement totalement décarboné (98% à partir de 2017).

Comme le montre la figure 2, Singapour est le leader mondial de l'électrification des transports, grâce à une part importante du transport ferroviaire. Toutefois, le pays est encore loin d’obtenir un mix énergétique décarboné : seulement 3% en 20175.

Figure 2: Les biocarburants progressent plus que l’électricité dans les transports6

Biocarburants progressent plus que l’électricité dans les transports

Source : Enerdata, Global Energy & CO2 Data

Qu'en est-il de la mobilité électrique ?

À long terme, la décarbonation progressive de l'approvisionnement en électricité, comme prévu dans la plupart des pays du G20, rend l’électrification des transports attrayante. Cependant, les progrès ont été minimes dans presque tous les pays et dans l’ensemble l’électrification des transports n’est guère significative.

Toutefois, à moyen terme, des progrès sont attendus grâce à l’introduction des véhicules électriques (principalement des véhicules légers). Des progrès sont également attendus dans le domaine des transports en commun, mais principalement à long terme en raison des énormes investissements nécessaires.

Bien que l’apparition des véhicules électriques sur le marché reste faible (généralement inférieure à 0,5%)7, elle progresse rapidement dans certains pays.

La part des voitures électriques dans les nouvelles immatriculations a doublé en Chine, aux États-Unis et dans l'UE en 2018 (de 2,7% en 2017 à 4,5% en 2018 en Chine et de 1% à 2% aux États-Unis et dans l'UE, selon la CAM8). La Norvège se démarque avec près de 50% des voitures neuves immatriculées en 2018 étant des voitures électriques (dont 63% sont alimentées par batterie et 37% par des hybrides rechargeables). La Chine espère dominer le marché des véhicules électriques avec un objectif de 45% des ventes de véhicules électriques9 d'ici 2030, comme le prévoit le plan « Made in China 2025 »10.

Selon les prévisions d'EnerFuture d'Enerdata, la part des carburants décarbonés (c’est-à-dire les biocarburants et l'électricité décarbonée) dans les transports pourrait atteindre 26% en 2040 au niveau mondial dans un scénario volontariste (Scénario EnerGreen11 d'Enerdata, qui représente le meilleur scénario de décarbonation), mais avec des niveaux d'adoption assez contrastés d'un pays à l'autre. Comme le montre la figure 3, la part projetée du total des carburants décarbonés varie : 36% dans l’UE, 30% aux États-Unis et seulement 20% en Chine. L'écart entre la Chine et les États-Unis est principalement dû à des prévisions plus solides concernant l'adoption de biocarburants aux États-Unis. Alors que l'UE devrait suivre le rythme des États-Unis en matière de biocarburants, une décarbonation plus poussée de l'électricité permettra à l'UE de prendre la tête du classement général.

Figure 3: Un Future “EnerGreen”– Décarbonisation des transports et une amélioration d’ici 2040, mais pas uniformément

EnerGreen - Décarbonisation des transports

Source : Enerdata, POLES Model – EnerFuture (Scénario EnerGreen), Janvier 2019

Notes:

  1. Cet article aborde un seul aspect de la transition vers le transport décarboné : le mix de combustibles. Les autres domaines tout aussi importants comprennent l'amélioration de l'efficacité énergétique des modes de transport, le transfert modal et la réduction de la mobilité.
  2. La teneur en carbone de l'électricité dépend de la part des sources décarbonées (renouvelables ou nucléaires) dans le mix énergétique.
  3. Toutes les parts de marché sont obtenues à partir de « Global Energy & CO2 Data » d’Enerdata ; elles sont basées sur des données historiques provenant d'une combinaison de sources pour 2017, y compris des sources IEA, Eurostat et nationales.
  4. Les transports ici sous-entendent les transports routiers et ferroviaires, ainsi que les transports aériens et maritimes intérieurs, conformément aux définitions internationales.
  5. La Chine, qui occupe la deuxième place après Singapour en matière d'électrification des transports, dispose d'un mix électrique à forte teneur en carbone (seulement 30% de sources décarbonées).
  6. Ce graphique ne montre que certains pays ayant une forte proportion de carburants de substitution.
  7. Dans les pays de l'UE et aux États-Unis, la part des voitures électriques représente environ 0,3% du stock de voitures ; il est d'environ 0,5% en Chine.
  8. Source des données sur la part des voitures électriques parmi les nouvelles immatriculations : Prof. Dr. Stefan Bratzel, E-Mobility 2019, CAM, « Centre of Auto Management », janvier 2019.
  9. Y compris les véhicules hybrides rechargeables, électriques et à hydrogène (voitures, véhicules utilitaires légers et autobus).
  10. Source : Jincheng Ni, France Stratégie, Note d’analyse n°70, Septembre 2018.
  11. Le scénario EnerGreen suppose des politiques climatiques plus strictes et la réalisation des objectifs de la NDC pour 2030, ainsi que des objectifs ambitieux par la suite, visant à limiter la hausse de la température mondiale à 2° C.

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